« Ce n’est pas parfait. »
« Je dois faire mieux. »
« Je ne peux pas me permettre de me tromper. »
Ces phrases, vous les entendez peut-être résonner dans votre tête.
Elles peuvent sembler anodines… mais elles sont les signes d’un driver puissant et discret : le driver Sois parfait.
Comprendre les drivers : ces injonctions qui nous pilotent
Les drivers sont des injonctions intériorisées très tôt, souvent dans l’enfance, que nous prenons pour des vérités nécessaires à notre valeur personnelle.
Parmi les plus courants :
Fais plaisir, Sois fort, Sois parfait, Fais vite, Fais des efforts.
Ce sont des messages implicites, souvent transmis inconsciemment par nos figures d’autorité, et qui façonnent en profondeur notre rapport au monde… et à nous-même.
Un petit récap ici 👇🏼

Le driver « Sois parfait » : l’illusion de la performance sans faille
Ce driver nous pousse à viser l’excellence en toute circonstance, à fuir l’erreur, à rechercher la validation par la qualité irréprochable de ce que l’on fait.
Il se manifeste par :
- un perfectionnisme rigide ou un sentiment d’insatisfaction chronique
- une peur paralysante de l’échec ou du jugement
- des difficultés à déléguer ou à faire confiance aux autres
- une tendance à surinvestir du temps ou de l’énergie pour atteindre un niveau “acceptable”
- Et surtout : une exigence démesurée vis-à-vis de soi-même… souvent bien plus forte que celle que les autres ont réellement.
Deux visions de l’exigence : perfectionnisme vs optimalisme
Pour mieux comprendre l’impact de ce driver, il peut être utile de distinguer deux formes d’exigence : celle du perfectionniste et celle de l’optimaliste.
Le perfectionniste : une quête irréaliste
Pour lui, seul le but compte. Le chemin n’a de valeur que s’il est linéaire, maîtrisé, sans échec.
Chaque imperfection devient une faute, chaque écart un danger pour l’image qu’il renvoie. Cette rigidité est souvent nourrie par un besoin de reconnaissance, une volonté de contrôle et une peur profonde d’être jugé.
C’est ce que Nathaniel Branden appelle la « pseudo-authenticité » : on cherche à montrer au monde une version impeccable de soi, quitte à se déconnecter de ce que l’on ressent vraiment, et une estime de soi dégradée.
L’optimaliste : l’exigence alliée à l’acceptation
L’optimaliste n’est pas moins ambitieux mais il sait que l’échec fait partie du chemin. Il reconnaît la valeur du processus, ajuste ses standards au contexte et pratique une forme d’indulgence active vis-à-vis de lui-même, mais aussi des autres.
Loin de la perfection rigide, il cherche le progrès juste et s’autorise à être en mouvement, même imparfait.
Une bonne intention qui peut devenir une impasse
Comme tous les drivers, Sois parfait part d’une bonne intention : donner le meilleur de soi, faire du travail de qualité, être fiable et reconnu.
Mais quand cette quête devient obsessionnelle, elle peut générer :
- stress, anxiété, fatigue
- perte de spontanéité, rigidité relationnelle
- autocritique incessante et perte de confiance
Quand le « parfait » empêche d’agir, de partager, de s’apaiser
Ce driver devient limitant quand il vous empêche :
- de passer à l’action (par peur de mal faire)
- d’être en lien authentique avec les autres (par peur de montrer ses failles)
- d’éprouver de la satisfaction (car ce n’est jamais “assez”)
Travailler sur ce driver, ce n’est pas devenir médiocre ou “laisser-aller”. C’est apprendre à reconnaître ce qui est suffisamment bon, à faire de la place à l’essai-erreur et à se détacher de la quête infinie du “toujours mieux”.
4 pistes concrètes pour apprivoiser ce Driver
1- Définir à l’avance ce que signifie « suffisamment bien »
Avant de commencer une tâche, je peux me poser cette question simple : qu’est-ce que « fait » veut dire ici ? Jusqu’où est-ce pertinent d’aller sans en faire trop ?
→ En fixant un seuil de validation, je limite le risque de perfectionnisme sans fin et je réajuste mes critères à la réalité du contexte.
2- Expérimenter le « non parfait volontaire » sur de petites actions
Et si j’envoyais ce mail sans le relire trois fois ? Et si je laissais une tournure moins fluide ou un détail imparfait ?
Avant une dernière modification, je prends une pause : Est-ce que cette retouche change vraiment l’impact ? Ou répond-elle à mon inconfort à « laisser tel quel » ?
→ Tester volontairement le « non parfait » me permet de constater que les conséquences redoutées n’arrivent pas… et de questionner mon besoin de contrôle. Je peux aussi décider que « bien et terminé » vaut mieux que « parfait et repoussé ».
3- Prendre le temps, en fin de journée, de se remémorer ce qui a été accompli
C’est l’histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein.
Est-ce que je peux reconnaître ce qui a été fait, même si tout n’est pas terminé ?
→ En choisissant de valoriser le réalisé plutôt que de focaliser sur ce qu’il manque, j’entraîne mon cerveau à voir le positif. C’est un premier pas vers un état d’esprit plus serein et réaliste.
4- Cultiver un regard plus bienveillant sur soi (et sur les autres)
À la place d’une autocritique rapide, je m’entraîne à nommer une chose que j’ai bien faite aujourd’hui.
Qu’est-ce que j’ai réussi ? Qu’est-ce que je pourrais ajuster demain, sans me juger ?
→ Et si je me parlais comme je parle à un ami ? Avec exigence peut-être, mais aussi avec respect et reconnaissance.
Et surtout : prenez conscience que vous avez de la valeur, même sans être parfait(e).
Vous souhaitez explorer vos propres drivers ?
Cette série continue avec un prochain article sur le driver « Fais vite », ce rythme intérieur qui nous pousse à aller toujours plus vite… parfois au détriment de l’essentiel.
→ Vous avez raté le premier article sur le driver « Fais plaisir » ?
Retrouvez-le ici : [lien]